Titres peu réjouissants des journaux sur les élections cantonales à venir. Combien de temps continuera-t-on à priver la moitié des électeurs de représentation politique en agitant l’épouvantail du FN? La seule réponse crédible est de retrouver un projet politique qui « parle » aux électeurs, et même une diversité de projets qui offrent un vrai choix et donnent du sens aux élections. Pas facile évidemment auprès d’électeurs repliés sur leurs problèmes dans un contexte où la réforme territoriale et la crise économique accentuent le sentiment d’abandon de territoires entiers, et où il est facile de faire des « politiques qui nous gouvernent », UMP et PS en tête, des boucs-émissaires de tous les maux réels et imaginaires.
Les projets devront être concerts, au plus près du terrain, correspondre à des besoins, donner de l’espoir, impliquer les personnes, leur proposer un avenir, les rentre acteurs à nouveau.
Le PS et de l’UMP, qui dominent pour le moment le paysage politique, ont l’idée un peu naïve que les voix des partenaires se reporteront toujours, quel que soit le nombre de sièges toujours décroissant qu’on leur concède et le peu de cas que l’on fait de leurs idées. Mais à force de mépriser les idées des centristes, de la gauche de la gauche ou des écologistes, et voir leurs élus réduits au rôle de supplétifs, les électeurs finissent par ne plus reporter leurs voix et l’abstention monte. Si pour ne rien arranger, le PS et l’UMP ont déçu une partie de leur électorat lors de leurs passages au pouvoir et ne donnent aucune raison à leurs alliés de reporter leurs voix, on comprend qu’il leur reste bien peu d’électeurs !
François Bayrou propose de revenir à un vote proportionnel. Excellente idée, mais pourquoi les deux partis en place renonceraient-ils volontairement à un mode de scrutin qui leur est si avantageux qu’il leur permet d’avoir presque tous les sièges avec une base électorale très réduite? Pourquoi renonceraient-ils aux charmes de leur position hégémonique? Par responsabilité politique, pour éviter le scandale de l’abstention massive et de l’absence de représentation politique de plus de la moitié des Français? Hélas, c’est sans doute leur prêter trop de vertu et une vision à long terme qu’on ne leur connait plus depuis longtemps.
En attendant la proportionnelle, il serait sage avant de ne plus avoir d’électeurs du tout de revenir à ce qui aurait dû rester la pratique de la cinquième République: on se compte au premier tour, puis on répartit les élus potentiels et on fusionne les programmes en fonction des résultats du premier tour. Il faut en effet se réunir au deuxième car aucun parti ne réunit seul plus de 50% des suffrages; mais pour rassembler, il faut que les électeurs puissent se reconnaitre dans la coalition de deuxième tour, qu’ils voient leur message entendu et reportent leurs voix là où ils retrouvent l’expression de leurs idées. Si le partenaire le plus fort se contente d’étrangler ses partenaires plus faibles en espérant un report automatique de leurs voix, elles finiront par ne plus se reporter. C’est une partie de l’explication des scores ridiculement faibles, en pourcentage des inscrits, de l’Aube et du Doubs.
Cette stratégie fait courir un risque au PS et à l’UMP: Au fil des élections, leurs partenaires risquent de retrouver un espace politique et de changer progressivement les rapports de force à l’intérieur des coalitions en présence. Il fut un temps où le PC dominait les socialistes, où l’UDF était plus forte que le RPR. L’histoire politique montre que les rapports de force changent, ce qui est une saine alternance. PS et UMP ont profité d’un rapport qui leur est favorable pour imposer un bi-partisme dont les Français ne veulent pas.
Ce risque est contre-balancé par un avantage certain: avoir un partenaire fort, c’est être assuré de gagner les élections. Quel est le plus grand risque? Gagner régulièrement les élections avec un partenaire fort ou tuer ses partenaires et se retrouver tout nu avec un score ridicule face au FN?
Photo de Mr_H, licence Creative Commons sur Flickr.