Y a-t-il une place pour le centre dans la vie politique française?

Sarkozy et Royal commencent à montrer quelques signes d’usure. Ils ont dû l’un et l’autre dépenser beaucoup d’énergie à s’imposer dans leur propre camp avant de commencer à faire campagne.

Bayrou a sur eux deux avantages: il n’a pas eu à perdre de temps à convaincre chez lui et a pu se consacrer depuis un an à une vraie réflexion sur un programme, mais structurellement, le mode de scrutin est son vrai handicap.

Ségolène a dû en passer par des primaires difficiles à gagner, elle peine à trouver des positions qui rassemblent son camp, divisé nettement depuis le referendum entre une gauche qui se veut historique, intransigeante et anti-libérale, et un centre gauche qui se réclame des autres PS européens et de quelques accomodements avec le libéralisme. A cette difficulté théorique s’ajoutent des questions d’image: faut-il jouer la virginité politique (toute relative chez cette ancienne ministre sortie de l’ENA) avec la démocratie participative ou mobiliser les réseaux traditionnels et ramener les « éléphants » sur le devant de la scène?

Sarkozy a patiemment fait le vide et occupé tous les postes stratégiques de l’UMP, son ministère lui prend du temps (mais lui offre aussi des occasions de se mettre en valeur), son positionnement reste des plus flous, pour séduire les classes populaires, il essaie de ne pas apparaître pour ce qu’il est, change de discours au point de citer Jaurès et Blum, est au gouvernement sans vouloir y être, bref, on serait bien en peine de savoir où il se situe véritablement.

L’un comme l’autre, malgré le flou de leur programme, sont néanmoins avantagés par un mode de suffrage qui favorise une polarisation gauche-droite. Malheureusement pour eux, l’épouvantail Le Pen, sur lequel ils comptaient pour ne pas avoir besoin d’un programme très détaillé, risque de faire défaut.

Même à la télévision, Le Pen apparaît comme un vieillard malade qui aura du mal à arriver au bout de sa campagne, s’il réussit finalement à recueillir ses cinq cents parainages (ce qui dépendra du bon vouloir du PS et de l’UMP in fine). Il aurait cent fois mieux fait d’envoyer sa fille au lieu de faire une campagne de trop.

Conclusion: Bayrou a l’avantage de l’expérience, d’un programme crédible, et d’une certaine fraîcheur, puisqu’il ne s’est pas usé dans des querelles internes avant de commencer.

Reste à savoir q’il y a de la place en France pour un centre, qui représenterait une vraie recomposition politique. Si l’on suit Patrick Roger du Monde dans son article du 23 février, le referendum et le 21 avril 2002 auraient été des tentatives avortées de réclamer une recomposition politique, dans un pays où l’assemblée est si peu représentative, en raison du mode de scrutin qui favorise les alliances et le bipartisme. Bayrou offrirait alors une vraie alternative, modérée et crédible, que les Français ne devraient pas manquer de saisir.

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