Les RG en campagne: Sarkozy s’inspire-t-il des méthodes soviétiques?

Le Canard Enchaîné a publié que les RG auraient reçu l’ordre du cabinet du ministre de l’intérieur d’enquêter sur Bruno Rebelle, membre de l’équipe Royal. Le ministre de l’intérieur commanderait des fiches à ses services de manière à accrocher quelques casseroles à l’adversaire socialiste.

La possibilité d’un tel détournement des services de l’Etat à des fins de campagne personnelle suscite légitimement l’indignation de la population et de la classe politique et devrait entraîner la démission du ministre de l’intérieur. Il serait prudent de le prier de choisir entre sa campagne et son portefeuille, dans une démocratie digne de ce nom. François Bayrou a tiré la sonnette d’alarme ce soir à Orleans.


Le mélange des genre était risqué et prévisible: Sarkozy organise lui-même des élections où il est candidat. Après cet incident, que les allégations du Canard soient vraies ou fausses, il devient évident qu’il est urgent de mettre un terme à cette confusion.

Le ralliement plus ou moins spontanné de députés UDF des Hauts de Seine à l’UMP est un autre indice d’une concentration malsaine d’argent et de pouvoirs sur un même candidat: maire de Neuilly, président du Conseil Général du département le plus riche de France, département connu pour les affaires de corruption qui ont marqué le mandat de son ancien président Pasqua, ministre de l’intérieur et président du parti qui a une majorité écrasante au Sénat et à la Chambre. Il ne lui manque que la présidence de la République pour devenir aussi autocratique que Poutine ! Dans n’importe quelle démocratie, M. Sarkozy serait prié de démissionner de ses principaux emplois pour être candidat, mais pas en France.

Le plus incroyable est la relative apathie du pays, malgré quelques dénonciations courageuses de la gauche et de l’UDF. Le pays y voit le dernier épisode d’une guéguerre entre Ségo et Sarko et compte les points sans vraiment prendre la mesure du déni de démocratie qu’une telle possibilité représente. Le PS se plaint surtout de l’atteinte à la vie privée et de la tactique d’un adversaire qui ne respecte aucune règle, mais il laisse entendre que puisque le jeu change, lui aussi va sortir son artillerie lourde. Les journaux nous rapportent comment les QG multiplient les réunions stratégiques. Curieusement, ce n’est pas la défense de la démocratie qui ressort le plus souvent des déclarations de la gauche. Il faut avouer qu’elle a dû elle aussi recourir en d’autres temps à ce genre de procédés inavouables.

La réaction de l’UMP est scandaleuse: d’un côté on dément, ce qui est de bonne guerre, je ne vois pas d’ailleurs comment reconnaître les faits sans devoir démisionner et même retirer sa candidature, mais de l’autre, au lieu de s’indigner avec le PS de l’atteinte à la démocratie, de présenter des excuses ou de diligenter une commission d’enquête indépendante, on insulte l’adversaire: « Ségolène perd ses nerfs », « trouver quel est son programme relève de l’exploration », « qu’Hollande laisse sa femme faire campagne toute seule », bref tout est bon pour décrédibiliser Ségolène, et utiliser de la manière la plus machiste qui soit le fait qu’elle est une femme pour la déstabiliser à l’intérieur de son parti et créer un soupçon permanent d’incompétence. Or, on peut tout penser de Ségolène, on peut la détester, mais certainement pas croire qu’elle serait une oie blanche inexpérimentée. C’est une femme politique tenace qui a monté très habilement sa candidature et qui est entourée de gens non moins habiles et tenaces. Curieusement, personne n’a demandé d’excuses publiques à l’UMP pour une telle réponse après les accusations du Canard, invectives indignes du pays des droits de l’homme dans lesquels se drape Chirac.

Là encore, je ne vois qu’un seul pays à avoir d’aussi bizarres moeurs politiques: Décrédibiliser l’adversaire, le ridiculiser en le faisant passer pour incompétent, détourner les « services » et les « ministères de force » au service de sa campagne, rallier les adversaires en les intimidant ou en les achetant, entourer son QG d’un appareil policier (voir cet article sur les plaintes des riverains), organiser soi-même ses propres élections, en dire le moins possible sur son programme, à part des généralités démagogiques, éviter tout vrai débat sur son bilan, faire pression sur les médias et apparaître bien plus souvent que les adversaires grâce aux fonctions que l’on occupe, se faire photographier en solitaire et s’exprimer dans de longs discours monologues ou des dialogues préparés d’avance, placer ses amis à tous les postes clés, cela ne vous rappelle rien? Si bien sûr: les decriptions par Anna Politkovskaia de la Fédération de Russie qui retourne aux pires heures du soviétisme avec son président Poutine. (Voir Douloureuse Russie, le journal d’une femme en colère qui relate la campagne de 2003-2004). Reste à espérer que le niveau de corruption soit moins élevé qu’en Russie…

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